La transition écologique fut au cœur des campagnes municipales et va faire l’objet de nouveaux projets dans les villes de taille moyenne et leurs intercommunalités. Le plan de relance crédite 30 milliards d’euros pour la transition écologique dont de nombreux crédits pour les territoires comme les 1,3 milliards d’euros pour la rénovation énergétique des bâtiments publics des collectivités. Les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE) porteront l’appui de l’État aux projets de territoire. Ondes urbaines, newsletter de l’association Villes de France, revient sur les enjeux de transition écologique portés par les maires de villes moyennes et les présidents d’intercommunalités.
Trois questions à Monsieur Jean-Marc Vayssouze-Faure, maire de Cahors, président de la CA du Grand Cahors, vice-président de Villes de France
Quels sont selon vous les enjeux majeurs de la transition écologique dans les villes moyennes et leurs intercommunalités ?
Si les enjeux sont nombreux et couvrent le large spectre des compétences exercées par les villes et les agglomérations (mobilités, habitat, espaces verts, biodiversité, agriculture…), la rénovation du bâti, ancien notamment, constitue une question majeure. Permettant d’éviter ou de limiter l’étalement urbain, la consommation d’espaces, la banalisation des paysages, les déplacements pendulaires, la facture énergétique des ménages…, le modèle de compacité auquel contribue la rénovation du bâti existant participe de façon concrète et transversale à une société économe des ressources et au défi de la transition écologique.
Il réinvente le cœur de nos villes et la vie de quartier, participant d’un levier de développement économique, à la vitalité de nos commerces, au lien social et à l’appartenance territoriale. En cela, la transition écologique fait la preuve de sa transversalité et de sa contribution à un modèle de société qui crée de la valeur écologique, économique et sociale.
Pouvez-vous présenter une initiative de votre collectivité que vous souhaiteriez partager ?
Depuis un peu plus de 10 ans, la ville de Cahors et le Grand Cahors s’engagent au profit d’un projet urbain qui consiste à « reconstruire la ville sur la ville ». Donnant la prime au renouvellement urbain plutôt qu’à l’étalement de notre cité, le projet Cahors, cœur d’Agglo met tout en œuvre pour cultiver le réflexe « centre-ville » des Cadurciens en matière de consommation, de logements, de loisirs, d’emplois…
Implanter les équipements structurants en centre-ville, révéler l’épaisseur historique de notre bâti, remettre en marché des logements rénovés, réaménager les espaces publics…, tout contribue à l’attractivité recouvrée de notre centralité.
Alors que ces initiatives conjuguées participent à l’affirmation d’un modèle urbain compact et économe sur un plan environnemental, le Grand Cahors s’attache aussi à innover et à rendre compatibles deux exigences du présent : la rénovation énergétique et la préservation de la valeur patrimoniale du bâti ancien. C’est dans ce cadre qu’est né le dispositif ENERPAT (Energie-Patrimoine) qui expérimente de nouvelles techniques d’éco-restauration du bâti ancien. En déployant, dans le cadre d’un partenariat large et exemplaire, une technique d’isolation en chaux-chanvre, le Grand Cahors contribue à l’émergence d’une nouvelle filière de développement économique local.
Mise en œuvre dans un bâtiment démonstrateur situé au cœur de Cahors, cette technique se déploie dans le cadre du projet européen SUDOE. Elle sert également les projets de rénovation des logements privés, les propriétaires bénéficiant d’une subvention du Grand Cahors lorsqu’ils s’engagent dans une rénovation utilisant des matériaux biosourcés.
En tant qu’élu local, quelles sont vos attentes vis-à-vis des institutions pour faciliter la transition écologique dans les territoires ?
Redonner vie au bâti existant relève d’une démarche plus complexe, plus coûteuse et plus longue à mettre en œuvre. L’initiative privée se mobilise de manière croissante au cœur de Cahors parce qu’elle sait pouvoir compter sur une palette très importante de subventions sans laquelle le modèle économique des opérations de restauration immobilière en nos villes moyennes ne s’équilibrerait pas.
Si nous souhaitons éviter le dumping entre centre et périphérie ou plus probablement entre renouvellement et étalement urbains, il convient d’agir sur tous les postes de dépenses qui peuvent grever une opération de réhabilitation. Dans nos villes, le modèle compact dépend d’interventions multiples sur des situations de friches et, parfois, de démolitions/reconstruction qui se heurtent à des coûts cachés. En particulier, la prescription de fouilles archéologiques peut, à elle seule, atteindre l’équilibre économique d’une opération au point de la remettre en cause. Pire, le risque qu’elle présente peut, ajouté à d’autres critères d’analyse, nourrir une préférence des acteurs pour le modèle de la construction neuve en périphérie de nos villes.
Si nous voulons limiter les multiples effets directs et invisibles de l’étalement urbain et que nous entendons faire de la transition écologique les bases d’un nouveau modèle, l’engagement des pouvoirs publics est essentiel et l’adaptation de notre législation ou la contribution de l’Etat au financement des surcoûts d’opération devrait sonner comme un préalable à cette noble intention.