Dans deux arrêts rendus sur les dépenses nécessaires aux missions exercées au nom de l’État par des agents des collectivités territoriales, le Conseil d’État a dernièrement jugé* - dans le domaine de la répression d’infractions au code de la route par la police municipale - que ces dépenses étaient normalement supportées par les collectivités, sauf celles qui concernent le fonctionnement de la régie de recettes.
En effet, l’article L. 2212-5 du code général des collectivités territoriales (CGCT) confie aux agents de police municipale la mission de constater par procès-verbal un certain nombre de contraventions au code de la route ou commises à l’occasion de la conduite d’un véhicule. Par ailleurs, les articles 529 et 529-1 du code de procédure pénale prévoient que les amendes forfaitaires infligées en cas de contraventions peuvent être payées directement aux agents verbalisateurs. Ces missions, exercées au nom de l’État par des agents employés par les communes, posent la question de savoir qui, de l’État ou des communes, doit en supporter la charge financière. Saisi de deux affaires opposant l’État et les communes de Versailles et de Strasbourg, le Conseil d’État a apporté une réponse de principe à cette question de portée générale.
Dans la première affaire, l’État avait été condamné à verser 400 000 euros à la commune de Versailles, ce qui correspondait aux frais de constatation de contraventions au code de la route par les agents de police municipale, aux frais de perception, par ces mêmes agents, des amendes forfaitaires résultant de ces contraventions et aux frais de fonctionnement d’une régie de recettes permettant l’encaissement des amendes (lorsque celles-ci ne sont pas directement réglées aux agents verbalisateurs).
Saisi par le ministre de l’Intérieur pour la cassation de cet arrêt de la Cour administrative de Versailles, le Conseil d’État pose un principe :
« lorsque la loi confie aux agents de collectivités territoriales ou de leurs groupements des missions à exercer au nom de l’Etat, elle entend indirectement mettre à la charge de ces collectivités ou groupements les dépenses nécessaires à l’exercice de ces missions, sauf si elle en dispose autrement ». Dans le domaine de la police municipale, les missions correspondantes sont bien exercées en son nom, le Conseil d’État a estimé que ce n’était pas à l’État de supporter ces dépenses.
Appliquant ce principe pour la commune de Versailles, le Conseil d’État a donc estimé d’après les dispositions de l’article L. 2212-5 du CGCT que « les frais d’établissement des avis de contraventions et des cartes de paiement des amendes forfaitaires, ainsi que les frais d’établissement des quittances délivrées immédiatement aux contrevenants qui s’acquittent des amendes auprès des agents verbalisateurs, sont des dépenses nécessaires à l’exercice des missions confiées aux agents de police municipale ». Pour ces dépenses, le Conseil d’État a donc estimé que la Cour administrative d’appel de Versailles avait eu tort de condamner l’État à indemniser la commune.
En revanche, il faut souligner que le Conseil d’État a approuvé la Cour administrative d’appel d’avoir condamné l’Etat à indemniser la commune à raison « des dépenses de fonctionnement de la régie de recettes ». En effet, « aucune disposition législative ne met directement ou indirectement à la charge des communes les frais de fonctionnement des régies de recettes créées par l’État auprès des communes afin de faciliter l’encaissement des recettes de l’État que sont les amendes forfaitaires ». Ces dépenses ne sont donc pas regardées comme nécessaires à l’exercice des missions confiées aux agents de police municipale, et doivent donc être supportées par l’État.
* CE, 22 octobre 2010, Ministre de l’intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales c/ commune de Versailles (décision n° 328102)
* CE, 22 octobre 2010, Commune de Strasbourg (décision n° 339013)