ONDES
URBAINES

Ondes moyennes n°629 -

Emprunts toxiques : les villes moyennes exigent maintenant une solution collective


Une délégation de représentants de villes moyennes* a rendu public le 4 décembre les résultats d’une enquête réalisée par la FVM auprès de ses membres, sur leur situation vis-à-vis des emprunts structurés de taux. Sur une centaine de réponses obtenues – soit un échantillon plus que représentatif de ses adhérents – une majorité de villes moyennes et intercommunalités détient des produits structurés dans son encours de dette (dans des proportions très variables : de 1 à 75 %).
Dans le contexte économique actuel, pour un tiers des répondants, une partie de ces produits structurés est devenue très nocive. Les types de prêt posant le plus de difficultés sont aujourd’hui des emprunts à barrière, avec période d’intérêts bonifiés, puis activation d’un index composé d’écarts de taux de change en devises (€ / CHF, ou $ / CHF, Yen / $...), et sur certaines échéances, les taux s’apprécient fortement (de 7% à 15% annuels !). Sur la centaine de répondants, un autre tiers, bien que concerné par des emprunts structurés de taux, juge sa situation budgétaire sous contrôle (emprunts à barrière simples, sans effets de levier, basés sur l’inflation ou l’euribor). Enfin, les collectivités restantes ne sont pas concernées (villes ou EPCI ayant uniquement souscrit des emprunts simples à taux fixe ou variable).
La trentaine de villes concernée par des emprunts toxiques a, en général, un endettement historique assez important, et présente malgré tout des disparités de situations : aussi bien riches que pauvres, de droite comme de gauche, de taille importante ou plus modeste, même si les villes moyennes de petite taille sont, en proportion, plus fréquemment atteintes.

Des négociations dans l’impasse
Les représentants des collectivités concernées par ces emprunts toxiques ont souligné qu’il y avait d’abord un intérêt – à titre conservatoire – à formuler des recours contentieux devant le TGI pour les villes qui auraient souscrit ou renégocié ce type d’emprunts, fin 2007 début 2008 (la prescription quinquennale arrivant à échéance).
Dans l’enquête, la plupart des villes moyennes et EPCI concernés se sont rapprochés en effet de leurs créanciers (Dexia, RBS ou Caisses d’épargne…) : les conditions de renégociation s’avèrent en général très défavorables, la soulte systématiquement trop élevée, voire dissuasive (de 75%  supérieure au capital restant dû : ce qui veut dire que les collectivités doivent payer pratiquement deux fois le capital emprunté pour sortir du montage !), et celle-ci ne peut bien évidemment être retenue politiquement, à un an et demi des municipales.
Face à des propositions de réaménagement qui peuvent même être encore plus pénalisantes (montages encore plus sophistiqués et donc risqués), ou aux manœuvres dilatoires exercées par les institutions bancaires pour sortir de cette situation, quelques villes moyennes ont déjà entamé une action contentieuse (Abbeville, Angoulême, Aubagne, Saint-Dié-des-Vosges, Saumur et Vienne), et d’autres s’apprêtent à le faire…
Estimant se trouver dans une « situation de force majeure », qui résulte d’un scénario imprévisible, irrésistible et insurmontable, les élus des villes moyennes ont appelé à débloquer en urgence avec l’État et les banques ces situations, qui mettent un coup d’arrêt brutal à l’investissement local, alors même que les collectivités locales peuvent jouer le rôle d’amortisseur de crise.

Pour un fonds de « soutien » collectif
Comme le proposait déjà le rapport de la mission d’enquête parlementaire Gorges-Bartolone sur les emprunts structurés, adopté à l’unanimité de ses membres, les maires des villes moyennes ont souligné qu’il était également indispensable de faire jouer collectivement la solidarité nationale : la FVM propose ainsi d’affecter une partie des fonds d’épargne dont dispose la CDC à une « structure de défaisance » (regroupant par catégorie, les types de prêts les plus dangereux), pour que ces collectivités aient de nouveau la capacité d’investir.

 

Pour l’avenir, la Fédération des Villes Moyennes souhaite enfin interdire l’accès du secteur public local aux produits spéculatifs, voire certains produits et propose de soumettre les contrats d’emprunts à moyen terme au Code des marchés publics.

* : Christian Pierret, ancien ministre, maire de Saint-Dié-des-Vosges, président de la FVM - Jean-Pierre Gorges, député-maire de Chartres, président de la  CA de Chartres Métropole - Philippe Lavaud, maire d’Angoulême, président de la CA du Grand Angoulême - Jean-Claude Pellerin, adjoint au maire de Romans-sur-Isère, chargé des finances - Jean-Paul Soulbieu, adjoint au maire de Lisieux, chargé des finances - Michel Crespel, directeur général des services d’Abbeville
Était également présent, Maurice Vincent, sénateur-maire de Saint-Étienne, et président de l'association : "Acteurs publics contre les emprunts toxiques"

n°629

05 Déc 2012

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