ONDES
URBAINES

Ondes moyennes n°678 -

Caution annulée, responsabilité de la collectivité engagée


Dans le cadre de son partenariat avec la Smacl, la FVM publie un nouveau commentaire juridique issu de l’Observatoire des risques juridiques de la vie territoriale. Cette semaine, la question traitée par l’analyse de la  jurisprudence concerne l’annulation d’une caution et la responsabilité de la collectivité.
L’affaire
Une société financière accorde, en 1987, un prêt de 3,3 millions de Deutsche Marks à une société en nom collectif (SNC), dont une commune (1600 hab.) se porte caution solidaire.La SNC se retrouvant dans l’impossibilité d’honorer sa dette, la caution de la commune est alors actionnée par l’établissement financier. La commune obtient l’annulation pour excès de pouvoir des délibérations ayant accordé sa garantie, pour défaut d’information du conseil municipal. Qu’à cela ne tienne : l’établissement financier recherche alors la responsabilité de la commune en réparation du préjudice subi du fait du non respect des engagements pris et de la promesse, actée par les délibérations du 10 septembre 1987, de se porter caution solidaire de la SNC.
Caution illégale
Le Conseil d’Etat confirme l’illégalité de la caution en s’appuyant sur une jurisprudence bien établie de la Cour de cassation :« (...) un contrat de cautionnement de droit privé conclu par un maire sans que le conseil municipal ait, au préalable, décidé d’accorder la garantie de la commune et l’ait autorisé à intervenir à cette fin au contrat de prêt correspondant est entaché de nullité ; (...) il en va de même dans l’hypothèse où la délibération décidant d’accorder la garantie de la commune est annulée pour excès de pouvoir et ainsi réputée n’être jamais intervenue. »
La commune n’est pas quitte pour autant : l’illégalité de la délibération a fait perdre au créancier le bénéfice de la garantie accordée par la commune lorsque la SNC s’est trouvée dans l’impossibilité d’honorer sa dette, soit le remboursement du principal de l’emprunt et de la majeure partie des intérêts. La commune engage ainsi sa responsabilité, non pas contractuelle, mais quasi-délictuelle.

 

Elle ne devra cependant pas réparer l’intégralité du préjudice subi par le créancier : ce dernier a commis une grave imprudence en octroyant un prêt d’un tel montant à la SNC, alors que la viabilité du projet apparaissait douteuse dès sa conception, et avec pour seule garantie la caution d’une commune aux capacités financières limitées. Une telle faute est de nature à exonérer la collectivité pour moitié, laquelle devra tout de même verser la somme de 843 632 euros.
Ce qu'il faut en retenir
- Un contrat de cautionnement de droit privé conclu par un maire sans que le conseil municipal ait, au préalable, décidé d’accorder la garantie de la commune et l’ait autorisé à intervenir à cette fin au contrat de prêt correspondant est entaché de nullité.
- Il en va de même dans l’hypothèse où la délibération décidant d’accorder la garantie de la commune est annulée pour excès de pouvoir.
- L’annulation de la délibération octroyant la garantie ne prive cependant pas le créancier de tout recours contre la commune : le préteur peut actionner la responsabilité quasi-délictuelle de la collectivité, faute pour cette dernière d’avoir tenu ses promesses et de l’avoir ainsi privé d’une garantie contre la défaillance de l’emprunteur.
- L’établissement financier peut aussi avoir commis une faute de nature à exonérer en tout ou partie la collectivité. Ainsi en l’espèce les juges estiment que le créancier, en accordant un emprunt d’un montant très élevé au vu de la viabilité douteuse du projet et des capacités financières limitées de la commune, a commis une grave imprudence de nature à exonérer la commune pour moitié.
Conseil d’Etat, 19 novembre 2013, N° 352615
Jurisprudence commentée sur www.observatoire-collectivites.org

n°678

15 Jan 2014

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Président : Gil Avérous

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