ONDES
URBAINES

Ondes urbaines n°56 -

40 propositions pour une stratégie nationale de l'enseignement supérieur


Prévue par la loi relative à l’enseignement supérieur et à la recherche du 22 juillet 2013, articulée avec la stratégie nationale de la recherche, la stratégie nationale de l’enseignement supérieur (StraNES) doit être présentée par le Gouvernement aux commissions compétentes du Parlement, afin de définir les priorités de la Nation pour son enseignement supérieur.
Un comité indépendant a été installé en février 2014 par la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. Sophie Béjean en est la présidente et Bertrand Monthubert le rapporteur général. Composé de 25 personnalités qualifiées issues d’horizons pluriels et choisies en fonction de leurs responsabilités, de leur parcours ou de leurs travaux de recherche, le comité a mené une large concertation en consultant l’ensemble des acteurs et des parties prenantes, à l’instar de Villes de France. Un rapport d’étape, rendu public en juillet 2014, a permis d’élargir la concertation. Intitulé « Pour une société apprenante - Propositions pour une stratégie nationale de l’enseignement supérieur », le rapport final a été remis en cette rentrée 2015.
À partir d’un constat des forces et faiblesses de l’enseignement supérieur français, le rapport identifie cinq axes stratégiques :
Construire une société apprenante et soutenir notre économie
Le rapport propose de porter à 60% d’une classe d’âge contre 42% aujourd’hui la proportion de diplômés de l’enseignement supérieur d’ici à 2025 (50% en Licence et 25% en Master), et de porter à 20.000 par an le nombre de doctorats délivrés. Il préconise également l’ouverture du chantier transversal de la formation tout au long de la vie : substituer un véritable continuum à la coupure actuelle entre formation initiale et formation continue, qui ne correspond plus aux besoins des jeunes, des travailleurs et des entreprises, revoir la répartition des fonds de la formation professionnelle en fléchant un pourcentage de la taxe d’apprentissage vers l’enseignement supérieur, avec pour cible qu’un étudiant sur 5 soit accueilli en formation continue ou professionnelle.
D’une manière générale, il s’agit de faire en sorte que les étudiants acquièrent les compétences nécessaires pour évoluer dans un monde qui change rapidement, où la complexité s’accroît, où l’utilisation des savoirs issus de la recherche est de plus en plus rapide.
Développer la dimension européenne et l’internationalisation de l’enseignement supérieur
Le rapport propose en particulier de doubler le nombre d’étudiants étrangers accueillis à l’horizon 2025 et de développer à leur égard une véritable « culture de la bienvenue ». En sens inverse, le rapport propose de doubler les flux de mobilité « sortante », en aidant les étudiants les plus modestes via le lancement d’un grand programme de soutien sur critères sociaux.
Favoriser une réelle accession sociale et agir pour l’inclusion
Favoriser une véritable démocratisation de l’accès à l’enseignement supérieur est un objectif central. Le but est de diviser par deux l’écart de diplomation entre les enfants d’ouvriers et de cadres, en agissant dès le secondaire. Le chemin passe par la réforme du processus d’orientation à l’entrée de l’enseignement supérieur, afin de garantir pour tous les bacheliers, y compris ceux issus des filières technologiques et professionnelles, un droit effectif d’accès avec des chances réelles de réussite dans une formation supérieure adaptée, en partageant la responsabilité de ce droit entre tous les acteurs publics, sous la responsabilité du recteur d’académie. En complément, le rapport préconise la création de filières et parcours adaptés et diversifiés en fonction du profil des étudiants.
– Inventer l’éducation supérieure du XXIe siècle
Cela suppose de passer à une pédagogie active, intégrant les apports du numérique et appuyée sur la recherche, qui pourrait bénéficier d’un grand programme de recherche sur la société apprenante. La transformation du rapport du savoir dans l’ère numérique implique des évolutions importantes dans la manière d’enseigner : l’usage du numérique doit être systématisé dans les formations et l’évaluation des étudiants. C’est aussi un renforcement des activités collaboratives, favorisant le travail en équipe, et contributives, qui est proposé. Tout ceci suppose que le système devienne plus agile, et en particulier adopte la « culture du oui », pour favoriser les expérimentations et l’innovation.
Répondre aux aspirations de la jeunesse
Il nous faut répondre au décalage entre les aspirations de la jeunesse et l’organisation de l’enseignement supérieur : mettre en place un environnement matériel qui favorise la réussite et remettre à plat les aides financières, assouplir les parcours, dynamiser la vie de campus et reconnaître l’engagement étudiant. Sur le volet financier, le rapport propose notamment de porter à 50% le pourcentage des boursiers dans l’enseignement supérieur, contre 36% aujourd’hui. Il recommande par ailleurs d’ouvrir un chantier transversal en vue d’une refonte du statut de l’étudiant, qui doit s’adapter à de nouvelles configurations : emploi étudiant, formation tout au long de la vie, reprise d’études, années préparatoires, année de césure.

 

Le rapport identifie également trois leviers principaux sur lesquels s’appuyer :
1– Dessiner un nouveau paysage pour l’enseignement supérieur
Il s’agit de permettre la mise en œuvre d’une stratégie réellement nationale, c’est-à-dire interministérielle, de l’enseignement supérieur, déclinée au plan local en stratégies de site portées par les regroupements d’établissements, en liaison avec les collectivités territoriales. Le rapport préconise l’installation d’un comité interministériel chargé de veiller à la cohérence globale des décisions concernant l’ensemble des formations post­baccalauréat. Le rapport souligne la nécessité de clarifier les rôles de l’État et des collectivités territoriales : « L’enseignement supérieur, comme la recherche et l’innovation, sont des domaines majeurs pour les collectivités territoriales, qui souhaitent, à juste titre, créer une dynamique économique et urbaine autour de l’offre de formation. Départements, régions, villes moyennes et métropoles revendiquent leur « part d’université » et investissent dans des infrastructures et des services de proximité. Dans ces logiques d’acteurs multiples, où le développement de l’enseignement supérieur est à même de modifier les hiérarchies urbaines et les équilibres territoriaux, la cohérence de l’action publique exige une clarification des rôles et des compétences, mais aussi une coordination des stratégies nationales, territoriales et d’établissements. »
Le comité propose également que la coordination locale, y compris pour la mise en œuvre des actions financées par le programme d’investissements d’avenir (PIA), soit effectuée à titre principal via les contrats quinquennaux, qui doivent devenir l’outil principal du dialogue stratégique entre l’État et les établissements. Enfin, l’État doit construire une relation renouvelée avec l’enseignement supérieur privé.
2– Écouter et soutenir les femmes et les hommes qui y travaillent
Cela implique de mieux prendre en compte l’investissement des enseignants­chercheurs dans la formation, les nouvelles formes pédagogiques (formation initiale et continue, développement des ressources numériques et des pratiques pédagogiques associées...), de former les enseignants du supérieur, d’identifier et développer les nouveaux métiers de l’enseignement supérieur, de construire de véritables équipes pédagogiques associant enseignants­chercheurs et personnels BIATSS, et de prolonger et amplifier le plan de création d’emplois dans l’enseignement supérieur et dans la recherche.
3– Investir pour la société apprenante.
L’enseignement supérieur a besoin d’un financement adapté. Sans méconnaître le poids des contraintes budgétaires, il est nécessaire de trouver les moyens d’investir dans la société apprenante. Le comité a examiné de façon approfondie la question des droits d’inscription, dont l’augmentation généralisée est souvent présentée comme une solution incontournable. Il a écarté cette option au vu d’éléments détaillés dans le rapport, au nombre desquels le souhait de préserver un modèle social que notre pays n’est d’ailleurs pas le seul à défendre. Pour ces différents axes et leviers, le rapport présente un ensemble de quarante propositions concrètes qui constituent un plan d’action global.
Télécharger l’intégralité du rapport

n°56

29 Sept 2015

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Président : Gil Avérous

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Rédacteur en chef
Guillaume Ségala

Rédaction
Armand Pinoteau, Margaux Beau, Arthur Urban, Anaëlle Chouillard

Secrétariat
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