ONDES
URBAINES

Ondes urbaines n°153 -

Une délégation de maires de Villes de France entendue par Elisabeth Borne


Apprenant, durant les Assises de la mobilité, le lancement d’une mission spécialement dédiée à la redéfinition du modèle ferroviaire français (mission confiée fin septembre à Jean-Cyril Spinetta), une délégation d’élus de Villes de France* a souhaité être reçue par la ministre chargée des Transports, Elisabeth Borne, pour évoquer plus particulièrement, la question des dessertes TGV des villes moyennes.
En effet, les élus de Villes de France restent quelque peu échaudés de l’épisode des Trains d’équilibre du territoire (TET) qui s’est traduit depuis 2016, outre une régionalisation de facto de certains TET, par un désengagement de l’opérateur historique (SNCF Mobilités) sur le réseau des lignes nationales secondaires. Jean-François Debat, maire de Bourg-en-Bresse, président délégué de Villes de France, a expliqué en préambule à la ministre, que la délégation était là pour dénoncer l’idée d’un système ferroviaire à deux vitesses, qui serait « conçu sur un mode origine-destination de métropoles à métropoles », et qui « zapperait » en quelque sorte le reste du territoire. Pour Frédéric Leturque, maire d’Arras, « la tonalité de la lettre de mission nous a conduit à repenser aux décennies passées » (…) « Villes de France apprécie toutefois la méthode de travail des Assises qui ont été lancées, et souhaite continuer à discuter de ce sujet très important, celui de la mobilité ferroviaire ».
Risques de fractures territoriales
Face à des scénarios qui envisagent - à très court terme - un sacrifice délibéré de l’activité ferroviaire, les représentants de Villes de France sont ainsi venus rappeler à la ministre chargée des Transports, que cette orientation constituait en réalité un « dérivatif, puisque si les trains ne circulent plus, les péages (NDLR versés au gestionnaire de l’infrastructure) n’alimenteront plus la regénération indispensable du réseau des grandes lignes ». D’ailleurs, si l’on imagine rééquilibrer financièrement le service ferroviaire en supprimant des dessertes villes moyennes, et en proposant uniquement des solutions de rabattement TER, et avec la rupture de charge que cela induit, là encore il y a un réel risque de dégradation de fréquentation du service.
Pour le président délégué de Villes de France, « les arbitrages entre 7 minutes supplémentaires pour une liaison LGV, ou une heure trente en plus pour rejoindre en TER la métropole, ne sont pas seulement financiers, ils sont aussi politiques, et les maires des villes moyennes sont venus souligner le risque de fractures territoriales pour des bassins de vie de plusieurs dizaines, voire centaines de milliers d’habitants ». Pierre Méhaignerie, ancien ministre, maire de Vitré, comme son collègue de Libourne, Philippe Buisson, estiment que les choix rencontrés dépassent effectivement le seul aménagement du territoire, avec le risque de vote extrême de décisions prises depuis Paris intra-muros. Le maire de Libourne souligne que la desserte de son territoire résulte d’ailleurs d’une convention de desserte signée avec l’État, convention qui intervient en contrepartie de l’intervention financière des collectivités locales dans la réalisation de la LGV Sud-Ouest.
Bien identifier tous les coûts
Au-delà des coûts d’utilisation de l’infrastructure que l’on oppose souvent aux élus, Pierre Méhaignerie, ajoute qu’il y a aussi des coûts environnementaux à prévoir s’il est fait le choix de l’utilisation de la voiture pour rejoindre la métropole la plus proche, de santé publique, de perte de temps… Il indique que les coûts salariaux et sociaux au niveau de l’opérateur ferroviaire sont également 20% plus élevés que les voisins d’outre-Rhin, ce qui pose la question de la compétitivité de SNCF Mobilités.
Olivier Gacquerre, maire de Béthune, estime pour sa part, au niveau de la méthode, indispensable de déterminer les objectifs avant de trouver des solutions de financement pour l’utilisation de l’infrastructure, qui dépassent sans doute le seul système ferroviaire. Il estime que SNCF Mobilités doit se concentrer sur sa mission : faire effectivement circuler les trains, et qu’ils arrivent à l’heure. Il insiste sur l’intérêt de déterminer une méthode d’expérimentation pour la gestion du premier ou du dernier kilomètre, qui serait confiée aux collectivités locales.
Des maires rassurés ?
En réponse à ces interventions, la ministre chargée des transports, Elisabeth Borne, se veut rassurante. Elle souligne que Villes de France a toute sa place pour exprimer ses messages, notamment dans le cadre des groupes techniques, constitués pour les Assises de la mobilité. Celle-ci précise vouloir éviter une « métropolisation rampante», et qu’elle souhaite au contraire une politique de transports équilibrée pour tous les territoires, avec une dette ferroviaire qui ne cesse de croître, et avec laquelle il faut composer (45 milliards d’euros).

 


Elle ajoute que si le Gouvernement à l’intention de faire une sélection dans les grands projets d’infrastructures, à l’issue des Assises de la mobilité d’ici la fin de l’année, c’est justement qu’il a été pris conscience de la nécessité d’accorder la priorité à la regénération des réseaux ferroviaires, et non de tout consacrer aux lignes à grandes vitesses. Elle indique d’elle demandera naturellement à Jean-Cyril Spinetta de recevoir Villes de France dans le cadre de sa réflexion.
* La délégation de représentants de Villes de France, conduite par Jean-François Debat, maire de Bourg-en-Bresse, président délégué, était composée de Pierre Méhaignerie, ancien ministre, maire de Vitré, Frédéric Leturque, maire d’Arras, de Philippe Buisson, maire de Libourne, et d’Olivier Gacquerre, maire de Béthune.

n°153

15 Nov 2017

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