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Ondes Urbaines

Economie

Y a-t-il un modèle de gouvernance idéal ?


Le 7 avril 2015 se sont tenus les 7èmes Rendez-vous de l’intelligence locale sur le thème de l’intercommunalité. A cette occasion, élus, experts et représentants de l’Etat ont débattu des changements de l’organisation territoriale et de l’avenir de la carte intercommunale.
A la recherche du périmètre pertinent
Pour les élus de Villes de France, dessiner des EPCI cohérents est une condition nécessaire à une bonne gouvernance,  un préalable indispensable pour obtenir des EPCI intégrés, et avancer dans les mutualisations. C’est pourquoi chiffrer un objectif de regroupement d’EPCI à horizon 2016, tel que le propose le CGET dans son rapport rendu public en février 2015, n’est pas une bonne méthode. Pour Villes de France, il faut abandonner cette logique comptable et lui préférer une logique géographique qui tienne compte des affinités locales et de l’équilibre territorial (proposition n°2 - manifeste).
Refuser les regroupements contraints
Si le CGET n’est pas parvenu à trouver le critère pertinent pour définir le périmètre « idéal » de l’intercommunalité, il plaide néanmoins pour une accélération du mouvement de regroupement : « ces mutualisations peuvent faire émerger du projet et palier le manque d'ingénierie des petites communes ». Aussi, le CGET a annoncé la mise en ligne prochaine d’un outil permettant d’améliorer la visibilité des élus sur les possibles évolutions de périmètres de leurs EPCI. L’outil doit permettre de réaliser des simulations de fusion, à partir des données démographiques et économiques. Cet outil sera bientôt mis en ligne sur le site du CGET.
Pour Jean-François Debat, maire de Bourg-en-Bresse et président délégué de Villes de France,  la question du périmètre est déterminante. Du périmètre retenu dépendront les compétences exercées. Un EPCI reprenant le périmètre du bassin de vie (et donc plus ou moins du SCoT), n’exercera pas les mêmes compétences qu’un EPCI organisé strictement autour de l’aire d’influence de la ville-centre.  Seul un périmètre restreint permet d’exercer des compétences de proximité, selon lui. « Il faut pouvoir mettre en cohérence les périmètres et les compétences ». Or cette cohérence ne peut pas être dictée par la loi, car « il n’y a pas « un » modèle d’EPCI ».
Il n’y a pas « un » modèle d’EPCI
Les configurations locales varient beaucoup en effet, en termes de périmètres, et donc, par ricochet, de compétences transférées et de gouvernance. Les cas de Dreux, Bergerac, Bourg-en-Bresse, Colmar ou même Calais présentés au cours du débat, illustrent la variété des situations rencontrées : présider un EPCI constitué de 5 communes (Calais) ou celui de Dreux composé de 78 communes et s’étendant sur une surface de 60km d’Est en Ouest ne relève pas du même exercice. De même, la facilité à coopérer diffère selon que le maire de la ville-centre est - ou non - président de l’EPCI. Dans le cas de Bergerac, le maire de la ville centre, Daniel Garrigue, est même exclu du bureau communautaire, alors que la ville centre pèse pour plus de la moitié de l’EPCI en nombre d’habitants, ce qui complique naturellement les mutualisations et velléités de coopération. Pour Jean-François Debat, ce cas illustre la nécessité non pas d’une loi pour encadrer de manière stricte et uniforme les intercommunalités, mais d’un texte qui se contente de donner un cadre et de restreindre les aberrations constatées ici ou là. « Il faut une loi qui évite les égoïsmes manifestes, mais qui pour le reste laisse les élus maitres de leurs périmètres ». Chacun doit pouvoir choisir le type d’EPCI qu’il veut. Mais dans tous les cas, il serait bon, pour les élus, de s’en tenir au dessein initial d’une intercommunalité de projet qui gère les grands équipements et permet de réaliser des missions que seules les communes ne pourraient plus financer ou ne seraient pas en mesure d’organiser de façon optimale.
Le secret d’une gouvernance réussie...
Pour tous les élus, il est évident qu’un EPCI ne doit pas être créé par obligation, mais doit naître d’un commun accord. Tous les partis doivent pouvoir y trouver leur intérêt, quelle que soit la taille de la commune ou la couleur politique de son maire. Les maires des villes et présidents d’agglomération se sont montrés très clairs à cet égard, et ont identifié deux conditions à la bonne marche de l’intercommunalité.
Deux écueils sont en effet à proscrire, dans cette logique de libre organisation, pour garantir le bon fonctionnement des EPCI.
D’une part, il faut pouvoir imposer que la ville-centre soit au bureau communautaire. « Il n'est pas pensable un seul instant que la ville centre soit écartée ; le cas de Bergerac dépasse l'acceptable. Une commune qui comprend la moitié de la population de l’EPCI ne peut pas être écartée. Elle doit être être représentée dans l'exécutif », a déclaré Gilbert Meyer. C’est pourquoi Villes de France propose, dans son manifeste, de « permettre au maire de la ville-centre de siéger de droit, avec voix délibérative au bureau communautaire » (proposition n°5).
D’autre part, le sort des petites communes, plus rurales, doit aussi être pris en compte. Pour Gérard Hamel, « il n'y a pas de petite commune à ignorer. Il y a juste un territoire à défendre. Toutes les communes ont une légitimité électorale ».
Dans ces organisations complexes, les maires et présidents ont plébiscité la conférence des maires, assemblée qui réunit les maires de toutes les communes membres et doit permettre de prendre une décision par le consensus. En général, explique Gérard Hamel, le consensus obtenu entre les maires est ensuite facilement repris en bureau et conseil communautaires. C’est un moyen très sûr de recueillir l’assentiment autour d’un projet, même si l’obtention du consensus prend souvent du temps.

 

Certains élus et représentants de l’Etat ont vu dans ces deux écueils un argument supplémentaire en faveur de l’élection des conseillers communautaires au suffrage universel direct sur une circonscription unique. Mais pour Gérard Hamel, Jean-François Debat ou encore Gilbert Meyer, élire les conseillers au suffrage universel direct signerait la mort de la commune. Or, est-ce vraiment ce que l’on veut ? Est-ce vraiment ce que les Français veulent, se sont interrogés les maires, qui recueillent souvent un indice de confiance très élevé de la part des administrés dans les sondages d’opinion. Les maires des villes sont convaincus que les citoyens ont besoin de leur maire et réclament de la proximité. Ils plaident donc davantage pour s’en tenir à l’objectif initial des EPCI : une intercommunalité de projet qui complète les actions des communes sur les compétences pour lesquels il est pertinent de mutualiser et de travailler ensemble, mais pas une collectivité territoriale de plus.
A l’issue de ces débats nourris entre maires, présidents et représentants de l’Etat, Gilbert Meyer, maire de Colmar et président de l’agglomération, s’est fait l’écho des propositions formulées par Villes de France dans son manifeste, pour former des EPCI aux périmètres cohérents et stables, faciliter l’exercice des compétences, et repenser les relations entre EPCI et ville-centre pour en faciliter le pilotage (propositions 1 à 6).

n°36

09 Avril 2015




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