ONDES
URBAINES

Ondes urbaines n°291 -

Focus sur… la transition écologique dans les Villes de France : Trois questions à Luc Bouard



La transition écologique fut au cœur des campagnes municipales et va faire l’objet de nouveaux projets dans les villes de taille moyenne et leurs intercommunalités. Le plan de relance crédite 30 milliards d’euros pour la transition écologique dont de nombreux crédits pour les territoires comme les 1,3 milliards d’euros pour la rénovation énergétique des bâtiments publics des collectivités. Les futurs contrats de relance et de transition écologique (CRTE) porteront l’appui de l’État aux projets de territoire. Ondes urbaines, newsletter de l’association Villes de France, revient sur les enjeux de transition écologique portés par les maires de villes moyennes et les présidents d’intercommunalités.

Trois questions à Monsieur Luc Bouard, maire de La Roche-sur-Yon, président de La Roche-sur-Yon Agglomération, secrétaire général de Villes de France

Quels sont selon vous les enjeux majeurs de la transition écologique dans les villes moyennes et leurs intercommunalités ?
Des enjeux financiers tout d’abord. La nécessaire transformation de nos politiques publiques à l’aune de la transition écologique suppose l’engagement de financements toujours plus importants, que ce soit en termse de rénovation énergétique, de conversion des flottes automobiles, de réalisation de voies cyclables ou encore d’investissements massifs dans les énergies renouvelables et les réseaux électriques intelligents, sans oublier l’accompagnement des publics les plus fragiles.
Se posent ensuite des enjeux de gouvernance. La multiplicité des niveaux d’intervention en matière de transition écologique, le partage des compétences entre différentes strates de collectivités, sans même parler des syndicats intercommunaux, peut rendre difficilement lisible et potentiellement moins efficiente l’action politique.
Des choix stratégiques s’imposent enfin, car lorsque l’on sait que la France génère moins de 1% des émissions mondiales de gaz à effet de serre, il serait illusoire de croire qu’une collectivité changera à elle seule le cours de l’histoire en matière d’atténuation du réchauffement. Pour autant, alors que les effets du réchauffement se manifestent déjà et s’amplifieront toujours plus dans les années à venir, les collectivités doivent à tout prix préparer au mieux adaptations et mutations.

Pouvez-vous présenter une initiative de votre collectivité que vous souhaiteriez partager ?
Je souhaiterai vous en présenter plusieurs ! Le Jardin d’affaires, 1re zone d’activité agro-écologique de France, concilie d’ores-et-déjà activités économiques et rationalisation du foncier, renforcement de la biodiversité et préservation des zones humides, développement de la permaculture et des circuits courts, dans une double logique d’économie circulaire et d’économie bleue.
La recyclerie Coeur-Vendée, installée sur une ancienne friche industrielle dans un bâtiment énergétiquement exemplaire, va permettre de développer une nouvelle activité économique, de donner une seconde vie à des objets issus des déchetteries, tout en facilitant l’insertion sur le marché du travail de personnes éloignées de l’emploi.
Notre opération «100 000 arbres pour demain» va aussi avoir un impact massif en terme de piégeage du dioxyde de carbone, de reconstitution de la trame verte ou encore de filtration et de rétention de l’eau, autre ressource menacée par le réchauffement.
Le Potager extraordinaire de Beautour sera enfin à partir de 2022 un lieu de démonstration et de sensibilisation à la

 

biodiversité, pour donner à chacun les moyens d’agir en faveur d’une faune et d’une flore toujours plus menacés, dont dépend pourtant notre alimentation.
C’est cela le rôle d’une collectivité : impulser, initier, faire comprendre et donner à tous les moyens d’agir !

En tant qu’élu local, quelles sont vos attentes vis-à-vis des institutions pour faciliter la transition écologique dans les territoires ?
Clarté, réactivité, simplification et libre-administration !
Aujourd’hui par exemple, les appels à projet de l’État se multiplient. S’ils sont gages d’accompagnement financier, ils ont pour conséquence que les projets doivent s’adapter aux financements alors que le principe de libre-administration des collectivités supposerait en réalité l’inverse. Des contractualisations de moyen terme s’engagent en parallèle avec les entités déconcentrées ou décentralisées, portant des niveaux d’engagements différents et des critères d’éligibilité spécifiques ; tout ceci induit au final redondance, faible lisibilité, et nécessite surtout toujours plus d’agilité et de temps passé de la part des collectivités !
En outre, alors que la transition écologique exige de porter des visions transversales et décloisonnées, il est parfois difficile d‘accepter des directives descendantes, issues de l’État ou de ses établissements publics, en silo, et parfois sans cohérence suffisante les unes avec les autres. L’urgence climatique vient aussi se heurter à la complexité réglementaire et juridique du montage de certains dossiers, sans même parler des délais d‘instruction.
On pourrait enfin se poser la question de l’échelon territorial le plus pertinent en matière de transition écologique : un Acte IV de la décentralisation n’aurait-il pas matière à rationaliser organisation, compétences et gouvernance sur certaines thématiques ?

n°291

04 Mars 2021

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